L’hiver a été dur, mais l’état de mon jardin révèle que le printemps est bien là, malgré le temps qui refuse obstinément de s’emmieuter. Se rappeler que nos ancêtres ont vécu «pire» nous aidera peut-être à patienter pour revoir fleurir lilas et magnolias.
L’année 1816 a été surnommée «l’année sans été». Il a neigé en juin et gelé en juillet, comme si une chape de froid avait recouvert la terre, à la stupéfaction de ses habitants. Cette année incroyable n’a pas été répertoriée dans les archives météorologiques savantes canadiennes qui remontent aux années 1840. Fin mars, le thermomètre indiquait toujours des températures de moins 6 à moins 9 (Celcius), rapporte la Gazette de Québec. Pour sa part, Le Spectateur Canadien relate, dans son édition du 3 juin 1816, qu’il y a eu des gelées du 12 au 19 mai. L’historien Jean Provencher rapporte qu’en Beauce, le capitaine de milice Auguste Labadie écrit: «Il est de mon devoire de dire la vérité que le 7 juin, les vents au nord toute la journée et gros vents et beaucoup de froid. Il a neigé presque toute la journée, que ce jour là même les montagnes au nord était blanche. Ce jour même à Ste.Marie, St-Joseph, St.François de la Beauc, les habitants ont traîné du bois avec leurs traines pour se chauffer. La nège du long des clôtures étoit d’un pied et demis d’épaisseurs.» Labadie fait état de 12 jours sans soleil. En juillet, les lacs dans la région de Baie Saint-Paul n’avaient toujours pas «calés». Les récoltes sont évidemment affectées par cette météo inusitée et la disette menace, ce pourquoi le gouvernement interdit les exportations de tout ce qui peut servir à faire du pain, révèle de son côté l’historien Jacques Lacoursière: blé, farine de blé, biscuit, fèves, pois, orge et grains de toutes espèces employés dans le pain. Lorsque le gouverneur Sherbrooke arrive au pays, à la suite de gelées en plein mois de juillet, il autorise l’importation de grains provenant des États-Unis pendant six mois. Les folies de cette météo déréglée ont frappé autant l’Europe que l’Amérique du Nord. Jean Provencher nous explique ce qui s’est passé: «On mettra du temps à faire le lien entre cette «année sans été» et l’éruption, l’année précédente, du Tambora, un volcan des Indes néerlandaises. Pendant des semaines, celui-ci avait craché dans l’atmosphère des tonnes de dioxyde de soufre qui, après un certain nombre de réactions chimiques, ont formé un voile à la lumière solaire et provoqué cette vague de froid sur la terre. On pense qu’il s’agit de la plus grande éruption volcanique depuis celle de 1601.» Louise Chevrier Sources :Jacques Lacoursière, Histoire populaire du Québec tome 2, de 1791 à 1841, Septentrion, 1996. Jean Provencher, Les Quatre Saisons dans la vallée du Saint-Laurent, Boréal, 1996. Ce texte vous inspire des commentaires? Vous souhaitez émettre une suggestion? Merci de nous écrire.