Le vendeur qui m’a contacté est formel. La carte postale qu’il a entre les mains et qu’il souhaite me vendre montre la «maison de Jean-Baptiste Moquin, maire de Richelieu de 1937-1941». Évidemment que je n’ai pas hésité à lui remettre un chèque afin d’obtenir cette pièce.
Elle est arrivée quelques jours plus tard. Surprise, il n’y a rien sur la carte qui permet d’identifier la résidence qui a été photographiée. C’est à l’évidence une maison cossue. Au deuxième étage, on distingue une grande galerie et peut-être bien une chaise berçeuse. Les fenêtres ont des volets, tous ouverts le jour de la photographie. La maison est entourée par une solide cloture. Du côté gauche, sans doute sur le trottoir, on voit deux jeunes femmes. Mais rien, à l’endos, qui indique où est située cette demeure. Idem pour le verso. La carte n’a jamais été utilisée et elle ne contient aucune écriture, sauf le chiffre correspondant à la somme demandée par le vendeur. Quant au photographe, il n’a pas cru bon apposer son nom ou encore l’adresse de son studio. Un doute m’assaille. Je me suis procuré une superbe carte postale, imprimée en quelques exemplaires sans doute. Mais qui pourrait bien montrer une maison de Montréal, de Saint-Jean-sur-Richelieu ou de Sorel. Je me suis permis d’envoyer par courriel la carte postale à Carole Fisette, membre de la Société d’histoire de la seigneurie de Chambly et passionnée par l’histoire de Richelieu, la municipalité qu’elle habite. Sa réponse n’a pas tardé à venir: «C’est bien la maison de Jean-Baptiste Moquin». Quelques jours plus tard, Carole Fisette m’envoie plusieurs détails historiques ainsi qu’un témoignage d’Antoinette Moquin, la fille de Jean-Baptiste. Ce témoignage est extrait du livre Paroisse Notre-Dame-de-Bonsecours. Jean-Baptiste Moquin est né à Chambly-Bassin en 1872. Il apprend le métier de menuisier auprès de son père. Il fabrique de grosses voitures et des traîneaux qu’il va livrer à Montréal à cheval. Il épouse Hélène Brassard de Saint-Hubert en 1894. Jean-Baptiste achète un terrain sur la bord de la rivière Richelieu et construit sa maison, la maison sur la carte postale. Elle se situait sur la 1re Rue, arrivant de Chambly, à droite après le pont, tout de suite après ce qui était le magasin général (maison en briques rouges qui existe encore, numéro civique 1130, 1re Rue). Dans les années 1990, la maison Moquin a été agrandie et est devenue une demeure pour personnes âgées, la Résidence Rivière Richelieu. Cette dernière a été démolie dernièrement. Derrière la maison, Jean-Baptiste Moquin avait construit un vaste atelier. C’est là qu’il a fabriqué durant plusieurs années des jouets en bois, des meubles pour poupées, des traîneaux, des chevaux berçants pour les tout-petits, etc. Ces objets étaient livrés à Montréal chez Pinard, un magasin sur la rue Saint-Denis et chez Morgan, rue Sainte-Catherine (La Baie). Jean-Baptiste Moquin a été maire de Richelieu de 1939 à 1941. Il est mort en 1964, à l’âge de 92 ans. Grâce aux notes de Carole Fisette, voilà une carte postale qui mérite sa place dans ma collection. François Gloutnay Ce texte vous inspire des commentaires? Vous souhaitez émettre une suggestion? Merci de nous écrire.