Les maitresses d’école, ces «demoiselles qui montraient l’école» (comme on disait faussement), ont été autrefois d’audacieuses entrepreneur(e)s. Souvent isolées dans leur école de rang, elles devaient seules entretenir les locaux, chauffer le poêle, balayer le plancher, pomper l’eau, pelleter la neige avant les premiers arrivés. Elle devaient aussi se faire conduire et ramener à leur école, matin et soir, ou bien s’installer à l’étage pour les nuits, se nourrir sur place. Soigner, habiller, consoler, animer, tempérer, parfois punir, parfois féliciter les écoliers en besoin. Elles devaient même, à une certaine époque, prélever la contribution obligatoire des parents et souffrir les «enfants pauvres exempts de payer cette somme». À la fin du trimestre, aller chercher son salaire au bureau de la Commission scolaire.
Les maitresses d’école devaient rester célibataires. Congédiées sur le champ si une grossesse s’avérait apparente, ou si elles se mariaient. Contrôlées par le commissaire du rang pour les dépenses de bois de chauffage; évaluées par l’inspecteur régional sur le rendement des écoliers, surveillées par le curé de la paroisse pour la bonne tenue morale et l’orthodoxie religieuse. Ainsi a débuté une instruction, bien élémentaire. Apprendre à lire, à écrire et à compter, avec quelques fois des notions de géographie, d’histoire, de sciences naturelles et de bienséance. Des éléments d’anglais. Mais toujours la prière journalière et les leçons de catéchisme apprises par coeur. Tout ceci devant une ou quelques dizaines de pupilles, garçons et filles, allant de 6 à 16 ans, aux aptitudes variées, aux motivations parfois rares. Les absences sont nombreuses au temps des récoltes. La Société d’histoire de la seigneurie de Chambly, suite aux recherches menées par un groupe de huit chercheur(e)s, vient de publier une histoire de ces vaillantes femmes et leurs conditions de travail. Les chercheurs ont localisé la plupart de ces écoles dans les rangs, dont il ne reste que quelques survivances. Ils ont identifié un bon nombre de ces pionnières d’origine. Quelques professeurs masculins, mieux payés, ressortent aussi de ces fouilles dans les archives. Le livre est abondamment illustré, avec des cartes appuyant la localisation des écoles de rang. On aborde la question des salaires, les écoles pour anglophones, les premiers précepteurs appelés maîtres d’école (alors qu’il n’existe pas d’écoles), les étudiantes venues de la Nouvelle-Angleterre apprendre le français à Chambly. Les historiens ont couvert les localités de Richelieu, Saint-Mathias, Carignan, Chambly et Saint-Basile. Bref, c’est un cahier de 136 pages, à conserver dans votre collection de référence. Il est en vente à la Société d’histoire de la seigneurie de Chambly, 2445, avenue Bourgogne. Paul-Henri Hudon Illustrations. Les pages couvertures de la récente publication de la Société d’histoire de la seigneurie de Chambly. Le temps des maîtresses d’école, septembre 2016, no 40, 136 pages. Ce texte vous inspire des commentaires? Vous souhaitez émettre une suggestion? Merci de nous écrire.