Genèse de la cuisine québécoise, de Jean-Marie Francoeur, un livre apparu en librairie cet automne, deviendra un ouvrage incontournable pour qui s’intéresse à l’histoire de nos habitudes et traditions alimentaires, ainsi qu’à nos manières de faire au Québec.
Ni historien ni écrivain, mais issu d’une famille où la cuisine a toujours tenue une place de choix, Jean-Marie Francoeur vient combler un vide dans l’historiographie québécoise, tant par son érudition que par le dépoussiérage des mythes et réalités de notre histoire alimentaire. Pourquoi un décorateur au cinéma et à la télévision décide de se lancer dans cette aventure qui a demandé onze années de recherches (et 10 000 pages de notes) pour remonter aux sources de notre culture alimentaire?Tout a commencé par l’histoire du… pâté chinois. Monsieur Francoeur contestait la fameuse thèse entourant les Chinois, venus construire le chemin de fer, qui auraient inventé ce mets dont la recette est consignée la première fois dans La cuisine raisonnée de 1926 (la première édition de cette bible de notre cuisine). Découvrant que les historiens savaient bien peu de chose sur l’origine de nos habitudes alimentaires, il s’est lancé dans une passionnante recherche. C’est ainsi qu’il s’est retrouvé en compagnie de Rabelais, «car nos traditions culinaires remontent parfois au Moyen Âge», à retracer notre goût des desserts, du sucré, des épices, à repérer nos ragoûts et autres bœuf à la mode. Il a lu et décortiqué des ouvrages comme Voyage de Pehr Kalm, ce naturaliste suédois venu en Nouvelle-France à la fin du régime français, et dont les observations fourmillent de détails sur les habitudes des Québécois d’autrefois. Et il observe une cassure en 1760, lorsque les Anglais arrivent. Mais les traces de nos origines françaises perdurent dans nos habitudes et aussi, dans le vocabulaire de notre français québécois, comme le constate l’auteur, qui, chemin faisant, a relevé l’origine de nombre de mots ou d’expressions. Ce livre sérieux se lit comme un roman: la langue est belle, et chaque chapitre constitue en soi une petite histoire qu’on déguste avec plaisir. On se promène dans le livre d’un chapitre à l’autre, on commence par la fin ou le milieu, au gré de nos intérêts ou de notre fantaisie. (rédaction: Louise Chevrier) Genèse de la cuisine québécoise, Jean-Marie Francoeur, Fides 2011, 610 pages, 49.95 $.