Bien hardis ceux qui s’y aventuraient, dit-on. Ah oui! Ce pont étroit sur câble d’acier qui enjambait les rapides de Chambly n’était pas rassurant! Les eaux furieuses du Richelieu butaient contre ses piliers. Il frémissait quand la glace d’avril percutait ses structures. Les bourrasques de vent menaçaient le promeneur. L’hiver, le plancher retenu par une armature minimale se couvrait de givre. Le bois se patinait sous l’humidité d’été. Pont branlant au vent. Pont glissant. Pont hésitant, décoiffant, mais tout de même invitant.
Ce chemin suspendu traversait entre Chambly et Richelieu à la hauteur de la rue actuelle des Voltigeurs. On parle d’un temps, entre 1910 et 1940, que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître. En fait, c’était une ligne de transmission électrique sous laquelle on avait aménagé un passage pour les piétons. Sur la tête, l’électricité à haute tension filait de Richelieu jusqu’à Montréal, sans égard pour les usagers. Les employés de la Montreal Light Heat and Power Company l’empruntaient pour se rendre à la centrale électrique. Les jeunes filles de la belle époque s’y faisaient photographier en dame blanche. Les gars, plus culottés, se disputaient le mérite du meilleur exploit sur les pylônes. Il restera dans les mémoires comme le pont branlant. Un souvenir folklorique, nostalgie du temps où on faisait du vélo sans casque et de l’auto sans ceinture de sécurité. Depuis, on le sait, les compagnies d’assurances-accidents ont passé par là. Deux piliers existent encore sur les rives, derniers témoins fatigués. Quand fut-il inauguré, ce pont? Quand l’a-t-on démoli? Quelqu’un sait-il? Paul-Henri Hudon Les photos proviennent des archives de la Société d’histoire de la seigneurie de Chambly:Fonds Charles-Henri Panet, P129 p01Fonds Denis Pelletier, P117p04Fonds Cécile Bédard, P181p19