Cette pratique matrimoniale était utilisée en France, mais plus rarement au Québec. Elle était devenue désuète lors de la refonte du Code civil en 1865.
Et l’on parle bien ici au pluriel, car il en fallait trois. Trois avis notariés et dûment reçus par les parents. Il s’agit d’une sorte de mise en demeure, non judiciaire, livrée non par le huissier mais par un tabellion, mais écrite de façon à respecter l’autorité paternelle. C’est une supplique répétée trois fois qu’un jeune prétendant adresse à son futur beau-père pour obtenir la main de sa fille. Il fallait avoir atteint l’âge de la majorité pour pouvoir se marier sans l’autorisation des parents. Même en ces cas, il était souhaitable que l’autorité paternelle soit consentante. Avant vingt-cinq ans pour le garçon et 21 ans pour la demoiselle, les parents devaient donner leur consentement. Un curé marieur ne pouvait pas passer outre sans porter atteinte à l’honneur de la famille. Il pouvait être passible de dommages en faveur des parents. Rappelons que le mariage d’autrefois ne faisait pas qu’unir des personnes, il engageait aussi des patrimoines, des dots, des avancements d’hoirie de part et d’autres. On fusionnait des propriétés. On fondait un “communauté de biens”, comprenant des préciputs et des douaires futurs. Voici le cas de Michel Derome. Par trois fois le notaire est dépêché, à la demande de Michel Derome, chez Étienne Brazeau, menuisier de Montréal, demandant l’autorisation de marier sa fille, Reine Brazeau, qui a fui, semble-t-il, le foyer domestique. Le père continue de s’opposer au mariage. Il menace même: “Quoiqu’absente, il la ramènerait à la maison”, parce qu’ il a des raisons d’opposition au mariage suffisantes” (Notaire François Leguay, 18 février 1786). On ignore les raisons de l’opposition. Finalement, le prétendant obtiendra gain de cause. “Michel Derome, 26 ans, fils de Jean-Baptiste et de Madeline Huno, épousera Marie-Reine Brazeau, 21 ans, fille d’Étienne et de Marie Caron à Montréal le 28 février 1786”. (Registre de Notre-Dame de Montréal). Sont témoins pour la mariée Louis Roussin et Marie-Josephte Goudreau, amis de l’épouse. Pas de Brazeau à la table de noces! Mais pas de dot non plus, évidemment. Fallait-il que l’amour soit plus fort que le “trousseau”! Paul-Henri Hudon Ce texte vous inspire des commentaires? Vous souhaitez émettre une suggestion? Merci de nous écrire.